MyTree - 27/02/2023

Prolifération des campagnols : enjeu agricole et environnemental

Bien qu’inoffensif, le campagnol, en grand nombre, provoque des dégâts agricoles considérables dans les prairies et dans certaines cultures.

 

 

Petit mammifères, gros dégâts

Le campagnol terrestre, ou rat taupier ou taupe grise, est une espèce endémique européenne vivant dans les zones de moyenne montagne, entre 700 et 1400 m d’altitude. A l’âge adulte, le rongeur atteint une taille d’environ 20 cm, il a l’apparence d’une souris bien que sa queue soit plus courte et ses oreilles moins proéminentes.

Dotés de dents d’une vingtaine mm, les campagnols mangent les racines de plantes en grande quantité, c’est-à-dire l’équivalence de leur poids par jour. Parmi les aliments à disposition dans une prairie, le campagnol privilégie les racines du trèfle violet, de la luzerne et de la dent de lion.

Ce rongeur est le principal ravageur des herbages permanents, suivi par ses acolytes le campagnol des champs et la taupe noire. Son appétit féroce, combiné à sa croissance exponentielle (100 petits par an et par couple) fait du campagnol la bête noire des agriculteurs dans les régions montagneuses, surtout dans la région Auvergne-Rhône-Alpes.

Grâce à leurs pattes et leurs dents, les campagnols creusent de nombreuses galeries dans le sol, transformant les prairies en taupinière. Consommant les racines de plantes très nutritives, les campagnols réduisent la diversité botanique des prairies. Les prairies, de faible valeur nutritive, deviennent presque inutilisables pour le pâturage. Les pertes en fourrage peuvent atteindre jusqu’à 45% (Cf. étude de l’INRA). Les agriculteurs sont contraints à puiser dans les stocks de fourrage hivernal ou à acheter des compléments alimentaires afin de maintenir la qualité et la quantité de lait. En 2012, la Franche-Comté a dénombré 60 000 hectares de terres agricoles affectées occasionnant des pertes autour de 22 millions d’euros.

Les campagnols s’attaquent aux racines des végétaux des prairies, leurs principales victimes, mais aussi aux vergers, vignobles et aux cultures.

 

A la racine du problème

Les écosystèmes sont régis par des équilibres, notamment biologiques, dont la variation d’un facteur peut déséquilibrer la biodiversité ainsi que les activités humaines. La prolifération des campagnols est l’illustration parfaite de ce déséquilibre : le déracinement des haies pour élargir les parcelles agricoles a fait fuir les prédateurs naturels du campagnol des haies qui étaient un habitat naturel et un lieu de chasse. Sans prédateurs, les campagnols ne sont nullement limités dans leur croissance démographique. Dans ces paysages simplifiés, les campagnols n’ont aucun mal à se disperser dans d’autres parcelles agricoles.

 

Quelles sont les solutions à disposition ?

Rétablir la chaîne alimentaire est LA solution contre la prolifération des campagnols, il faut donc faire revenir les prédateurs en plantant des haies pour les accueillir. Quels sont les prédateurs de ce mammifère ? L’hermine est une grande consommatrice de campagnols, une famille peut en manger 7 à 15 par jour ! En tant que prédateur principal du campagnol, la population d’hermines fluctue en fonction de celle du campagnol. Sa présence est donc une arme efficace contre la prolifération de ce rongeur.

Citons d’autres prédateurs mammifères des campagnols comme le putois, la fouine, la belette, la martre, les rapaces et les chats domestiques et forestiers.

Le cycle de prolifération du campagnol terrestre s’étale sur une période de 5 à 7 ans. Les possibles interventions de lutte se situent vers les années précédant le pic de prolifération. Une fois le pic atteint, il est extrêmement difficile de réduire la population de campagnols, même avec l’aide des prédateurs. Il est nécessaire d’anticiper au plus tôt avant que la population n’atteigne le seuil de nuisibilité biologique (10 à 20 animaux à l’hectare) et surtout le seuil de nuisibilité économique (100 à 200 animaux à l’hectare).

L’enjeu est donc d’attirer tout le cortège de prédateurs au plus près des prairies. Le moyen le plus efficace est de planter des haies pour recréer le réseau écologique (la Trame Verte) nécessaire au cycle de vie des prédateurs.

Toutefois, recréer un réseau bocager est une solution évidente mais sur le long terme. Les agriculteurs ont souvent recours à des solutions rapides de lutte mécanique qui nécessitent du temps et de la patience ou des solutions de lutte chimique. Or, ces produits biocides occasionnent des dégâts sur l’ensemble de la biodiversité et particulièrement les prédateurs consommant les campagnols devenus toxiques par ces produits.